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"Yunyi Khudozhnik (revue "Jeune Artiste")" raconte les voyages du peintre russe Nikolaï Kouzmine au Danemark et en Angleterre.

 

 

1997

 

Images :
1) Sur cette photographie de 1997 : ce paysage typique du Danemark, mais avec les pissenlits de son pays natal, inspire Nikolaï Kouzmine.
2) Londres. Houses of Parliament. Huile. 1995.
3) Le Danemark. Au port. Huile. 1995.
4) Hampton Court. Huile. 1995.
5) Chapelle à Herning. Huile. 1995.
6) Hanne. Huile. 1995.
7) L'Orangerie de Kensington Gardens. Huile. 1995.

AVEC SON CHEVALET AU DANEMARK ET EN ANGLETERRE.

Admirateur de Nikolaï Kouzmine, j’ai été particulièrement curieux de voir ses réactions devant un univers complètement différent de celui de Moscou. Nikolaï Kouzmine a visité l’Occident et le Danemark pour la première fois en 1995, où il séjourna à Herning, tout en faisant des excusions aussi bien à Funen que le long de la côte occidentale. Le peintre a su saisir l'atmosphère de chaque localité et en capturer l'esprit, en recourant à la gamme de couleurs et à la composition qui lui sont si propres, pour rendre de sa main à la fois sûre et sensible ces nouveaux thèmes urbains, ruraux, et marins. Ces tableaux vous saisissent dès le premier regard, pour offrir à leur possesseur une joie dont on ne saurait se lasser.

Hilton Luke, Danemark.

Par la suite, ces tableaux ont été exposés lors de la rétrospective du Maître à la Maison Centrale du Peintre, l'Annexe Art Moderne et Contemporain de la Galerie Trétiakov, quai de Crimée, à Moscou.

Les visiteurs ont pu ressentir le charme et l'intimité de l'architecture danoise, l'air vivifiant de la Mer du Nord, la délicatesse de la palette de couleurs des parcs, des jetées, d'un port avec ses frêles embarcations, ou admirer de célèbres hauts-lieux de la brumeuse Albion, ainsi que des interprétations très poétiques, très pittoresques, de la nature anglaise, de son architecture, des recoins admirables de ses parcs. Les études de Kouzmine, rapides (réalisées en une à deux séances de travail), s'y avéraient, par leur harmonie chromatique, des oeuvres véritablement achevées, tandis que ses tableaux plus conceptualisés, plus aboutis, ne perdaient rien de la fraîcheur ni de la force des esquisses.

Nikolaï Kouzmine est né et a grandi à Nijni-Novgorod. Mais depuis 1965, année où il a réussi le concours d'entrée à l'Institut Stroganoff, il vit et travaille à Moscou.

Enfant, il aimait déjà faire de grands dessins aux crayons de couleurs, observer des reproductions dans des albums et livres d'art. Mais à vrai dire, il n'était pas rare qu'il fasse des escapades à la capitale pour aller à la galerie Trétiakov, admirer les originaux des maîtres russes. C'est encore avec émotion qu'il s'en souvient : "Lorsque j'étais gamin, j'allais à la galerie Trétiakov. Je passais la nuit dans la gare, me débarbouillais dans les toilettes le matin, et en route pour la galerie Trétiakov..."

L'architecture russe, les images de la nature de sa terre natale, occupent une place centrale dans l'oeuvre de Kouzmine. Paradoxalement, c'est son engouement passionné pour ces thèmes qui est devenue la cause de ses voyages si fructueux et prolifiques en Europe. Voici comment Nikolaï Vassilievitch Kouzmine raconte l'heureux hasard qui lui échut de manière si totalement imprévisible et inattendue :

Par un beau jour d'hiver, je peignais l'Église de l'Archange Saint-Michel dans le quartier de la station de métro Yougo-Zapadnaïa (litt. : "Sud-Ouest"). Un homme s'est approché, est resté là debout, à suivre mon travail, sans me déranger.

Un bon bout de temps s'est écoulé ainsi. Or, il faisait froid : il était gelé. Et j'ai eu le sentiment qu'il aurait voulu dire quelque chose, mais qu'il ne parlait pas russe. Plus tard, j'ai su qu'il était né en Angleterre, vivait au Danemark, qu'il était un enseignant à l'université ordinaire, qu'il n'avait pas un salaire mirobolant selon les normes occidentales. Son nom est Harry Luke. Et voilà qu'ayant vu mes toiles, il s'est intéressé à mon travail et m'a invité au Danemark. Pour moi, la possibilité de faire un voyage à l'étranger, je n'y songeais pas même en rêve. Mais Harry m'a tout simplement offert les billets pour le Danemark et le gîte et le couvert sur place, et je l'ai remboursé avec mes modestes toiles. Par la suite vint une invitation à aller en Angleterre de la part d'amateurs d'art moscovites.

J'ai été très inspiré par les gens, les images, les villes, les tableaux que j'y ai vus. Mais laissez-moi tâcher de vous faire un récit plus ordonné de ce qui m'a le plus ému, touché, et surpris.

 

 

Harry nous a accompagnés de l'aéroport de Copenhague à la ville de Herning. Le long de routes lisses comme un billard, nous avons longé des villages et des fermes apprêtées comme des jouets miniatures, un paysage comme tout droit sorti d'un tableau, de champs bien tenus, de pâtures fleuries, d'arbres incroyablement pittoresques. J'avais l'impression de me trouver à l'intérieur d'un magnifique prospectus publicitaire, à la réalité duquel je ne dus de croire que parce que tout ce que je voyais, je le voyais de mes propres yeux.

Herning. Il s'agit d'une petite ville, moderne, terriblement accueillante. La maison où nous étions logés avait un préau avec cuisine d'été, sous lequel nos hôtes et leurs amis se retrouvaient pour prendre un peu de repos en admirant le jardin.

Or, admirer, il y avait vraiment de quoi : une belle pelouse, bien dense et égale, des pommiers, des arbustes aux couleurs si vives, profusion de fleurs de toutes sortes. C'était à en oublier que nous nous trouvions en Europe du Nord. Là-bas, le jardin attenant à la maison fait la fierté et l'objet de l'amour de tout propriétaire. Lorsque nous avons rencontré d'autres habitants de Herning, ce que tous nous ont montré en premier lieu, c'était leur jardin. Chacun d'entre eux reflétait des goûts différents en matière de flore. Le jardin, pour un Danois, c'est son petit paradis, qu'il a créé de ses propres mains, dans lequel il peut goûter au repos physique, et se ressourcer moralement et spirituellement.

Je passais toutes mes journées avec mon chevalet. Il y avait tant de choses nouvelles, curieuses, mystérieuses, et merveilleuses, partout ! Telle ferme à Skvostrup, avec ses pâturages et leurs jolies marguerites, les bateaux de pêcheurs au port, les cumulus-tombeaux des premiers princes chrétiens du Danemark, les cathédrales anciennes, les monuments, les rues, ces parcs étonnants, ces arbustes en fleurs oranges à perte de vue... tout était précieux pour mon inspiration, j'aurais voulu tout peindre.

Durant notre séjour à Odense, la patrie d'Andersen, il a plu, de temps à autre, une pluie silencieuse, calme, paisible, comme si la nature essayait de ne pas faire de bruit, pour nous aider à comprendre et à aimer le pays du grand conteur.

Et c'est là que j'ai également mieux compris l'esprit de l'art populaire des peintures murales, de ces tableaux avec des arbres somptueux, des fleurs merveilleuses, de jolies petites maisons avec balustrades, étangs, cygnes, dames en chapeaux à larges bords et toilettes élégantes.

C'est un pays béni, et ce sont des gens merveilleux. Je suis extrêmement reconnaissant à Harry pour sa cordialité et pour son hospitalité, pour ces jours inoubliables que j'ai passés au pays d'Andersen, lui qui considérait que la vie et la nature étaient inépuisables pour l'art, mais que c'étaient nos yeux qui n'étaient pas encore prêts à recevoir toute la beauté de la création.

Mon exposition à la Maison Centrale des Artistes s’appelait « Le lien entre les temps ». C'est étonnant comme tout est intriqué dans la vie. J'ai été bercé par le son d'une horloge « Pavel Bouré ». Et le hasard a voulu que j'entende la musique du Big Ben anglais. A propos, en Angleterre, il y a des coqs sur chaque cathédrale, et pour nous les coqs, c'est dans Pouchkine, « Le Coq d'or »...

Big Ben... C'est par lui que débutent le décompte et le conte du temps britannique, tout comme en Russie il part de l'horloge de la tour Spasski.

Son image est reproduite sur les vieilles pendules murales au lent mouvement de balancier et au son musical. Big Ben est bel et bien une prémisse architecturale. Lorsqu'on traverse à pieds l'un de ces ponts de la Tamise, on découvre des panoramas familiers grâce aux tableaux de Claude Monet. Le vieux Londres - ses vastes bâtiments, ses monuments, ses palais ceints de parcs et de jardins. Les parcs sont reliés les uns aux autres, se fondent les uns dans les autres, jusqu'à sembler infinis. Eux aussi, ils surprennent, par leur grandeur, leur beauté, leur entretien, leur lumière et leur propreté. Les gens s'y égayent en foule, s'extasiant devant la vie et la beauté.

 

La Tour, c'est à la fois un ancien château et un pont fantastique. La combinaison entre le château chevaleresque et l'architecture d'un pont sublime produit une impression inaltérable. La Tour, tout comme Big Ben, est un symbole de Londres. Sur le chemin qui y mène, on est frappé par la beauté et la taille de la cathédrale Saint-Paul. Elle est visible des quatre coins de la ville. Les canaux et les églises avec leurs hautes flèches forment également l'une des caractéristiques du paysage. Il fut un temps où les canaux servaient au transport de marchandises et de charges. Mais de nos jours, comme à Venise, ils servent à des vedettes propres comme des gondoles, sur lesquelles naviguent les touristes.

La nuit tombe. Le cadran de Big Ben s'éclaire. La lune s'est levée, de lointaines étoiles apparaissent. Les innombrables lampadaires des ponts et des quais sont allumés, les enseignes publicitaires aussi.

Le ciel s'est empli de violets, de mauves, de lilas, à l'infini, comme dans la palette des vues de Londres par Monet.

La Tate Gallery, la National Gallery, la Royal Academy of Arts, les orangeries, les serres, les parcs, les cathédrales... tout cela constitue autant de trésors de culture inestimables. La visite de Windsor, de Canterbury, d'un moulin à aubes, d'une école privée : tout cela m'a plongé dans le ravissement. J'avais le désir de transmettre ces émotions si fortes à travers mes tableaux. Ce type de voyages aide à pénétrer le sens de la vie, de la culture, de la nature, d'atteindre à la vérité en peinture - celle-là même à laquelle le peintre se voue.

 

English-language version

Оригинал статьи на русском языке

 

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